Lorsque je suis venue la première fois dans la classe, j’ai vu qu’ils étaient des enfants, et ils étaient masqués. Je n’étais pas seule avec eux, il y avait Sybille, et Ivan, ou Lisa, leur présence était une aide. J’ai pensé surtout : il ne faut pas trop parler. Je me disais aussi : je ne peux pas leur apprendre à écrire, seulement les aider à trouver certains canaux pour l’écriture, ceux que j’emprunte moi-même.
Une concentration. Une attention. Une confiance.
Avec le temps ils se sont révélés et c’était beau. Je me souviens du jour où ils se sont exercés à lire au micro, à l’abbaye d’Ardenne. Ils se sont placés les uns derrière les autres, spontanément, ils ont lu avec force, même les plus fragiles.
Biographie :
Née à Paris en 1977, Lucie Taïeb enseigne à l’université de Brest. Depuis son premier recueil de poésie, Tout aura brûlé, paru aux éditions Les Inaperçus en 2013, elle poursuit sa recherche d’une écriture de la justesse, centrée sur l’unité du poème ou du fragment, souvent polyphonique, à travers des genres variés (essai, roman, poésie). Depuis 2015, sa poésie est publiée par les éditions Lanskine : La Retenue (2015), Depuis Distance (2017), Peuplié (2019), et par les éditions de l’Ogre pour les formes narratives : Safe (2015), Les Échappées (Prix Wepler 2019) et Capitaine Vertu, (2022). Lucie Taïeb est également traductrice, notamment des poètes autrichiens Ernst Jandl et Friederike Mayröcker.