Meurtre et compassion
Elle venait de dire non !
Elle s’appelait Corina, elle avait trente et un ans, c’était une femme bien dans sa vie mais qui manquait de confiance en elle. Elle était mariée à un homme qui s’appelait Baptiste et ensemble, ils avaient quatre enfants, des jumeaux Éléonore et Jules qui avaient neuf ans, Carla qui avait douze ans et Antoine qui lui avait quatorze ans. Tous ensemble vivaient à Barcelone une grande ville dans laquelle ils se plaisaient bien. Corina souhaitait une vie idéale, celle dont tout le monde rêve car son enfance n’avait pas été des plus joyeuses : sa mère était morte quand elle avait onze ans et son père avait sombré dans une dépression sévère. Il ne souriait plus, n’avait plus goût à rien et c’est pour cela qu’aujourd’hui elle s’assurait que tout son entourage soit comblé de bonheur.
Elle venait de dire non à Édouard Christy qui était son meilleur ami depuis l’école primaire. Pour Édouard, meilleur ami n’était pas suffisant, il venait de lui proposer une vie à ses côtés. Mais Corina n’était pas intéressée, sa vie lui plaisait beaucoup trop.
Alors elle sortit du bâtiment, la mine triste, la tête baissée, et ses longs cheveux recouvraient son visage. Quelques instants après que la porte se soit fermée, une larme coula sur sa joue, puis une deuxième, jusqu’à ce que ses joues soient recouvertes; elle se mit à courir pour éviter que les gens la remarquent. Non seulement elle venait de perdre une amitié mais en plus elle l’avait fait d’une façon qu’elle détestait : « dire non ».
Quelques semaines après cet événement, sa vie avait repris normalement. Bien sûr elle n’avait rien dit à personne de peur d’inquiéter sa famille. Cependant Édouard lui manquait et elle pensait à lui...
Un soir, à l’heure du dîner, Corina s’exclama :
— Les enfants, venez mettre la table !
— On arrive, répondirent-ils.
Les enfants descendirent et commencèrent à ouvrir les placards, quand Antoine demanda d’un ton angoissé :
— Papa ne rentre pas pour le dîner ?
— Eh bien, il ne m’a pas prévenue, répondit Corina d’un ton désabusé, mais j’imagine que non.
Malheureusement, Baptiste ne rentra, ni après le dîner, ni après les heures et les jours suivants. Corina était morte d’inquiétude. Elle faisait tout son possible pour le retrouver ! Elle avait contacté la police, lancé des recherches mais toujours rien. Elle était épuisée et ne dormait plus la nuit...
Un jour, vers huit heures du matin, deux policiers sonnèrent à la porte. Un grand blond dit d’un ton doux et calme :
— Bonjour madame, nous sommes deux agents de police et nous sommes venus vous annoncer ce qui est arrivé à votre mari.
Le deuxième policier, encore plus mal à l’aise que son collègue, annonça :
— Même si nous pensons que vous n’êtes pas prête à entendre ce que nous avons à vous dire, nous sommes en devoir de le faire.
Les deux messieurs se regardèrent d’un air inquiet.
— J’ai le regret de vous dire que...
Le policier blond baissa la tête et son collègue prit le relai :
— Votre mari vous a quittée !
Une larme coula sur la joue de Corina et elle puisa dans ses dernières forces pour prononcer ces mots :
— M’a quittée... moi ou le monde?
Le policier la regarda avec pitié et dit :
— Le monde, madame.
Son collègue enchaîna :
— Votre mari a été assassiné mais le coupable n’a laissé aucune trace, il est introuvable alors nous continuons les recherches et nous vous préviendrons dès que nous en saurons plus.
Corina fixait un point, son regard était vide, ses joues remplies de larmes. Les policiers l’aidèrent à rejoindre le canapé et lui parlèrent sans recevoir de réponse de sa part. Au bout d’une heure et demie, les policiers se levèrent et laissèrent Corina dans ses pensées, allongée dans le canapé.
Cela faisait deux jours que Corina n’avait pas bougé du canapé et que matin midi et soir, elle répétait à ses enfants :
— Il doit y avoir ce qu’il faut dans les placards.
Entre temps les policiers étaient revenus, ils avaient découvert comment Baptiste était mort. Sur le lieu du crime, ils avaient trouvé un couteau bleu en céramique, sur lequel on avait inscrit « je t’ai bien eu ». Mais les policiers avaient surtout remarqué l’état pitoyable de Corina et avaient décidé de faire intervenir une psychologue; celle-ci devait venir ce jour-là.
Dans la journée, la psychologue était passée, restée plus de deux heures, et Corina avait juste dit qu’elle ne pouvait plus continuer à s’occuper de ses enfants. Alors la psychologue proposa de les placer dans une famille et la jeune femme accepta mais elle ne voulait pas confier ses amours à n’importe qui. Elle prit la décision de les confier à Édouard Christy, son ami d’enfance, en qui elle pouvait avoir confiance et qui accepta tout de suite.
C’était rassurant pour les enfants, qui avaient toujours bien aimé Édouard. Ils le trouvaient drôle, gentil et chaleureux. Et il prenait toujours soin d’eux, il leur préparait des bons goûters comme cette après-midi où il leur avait fait un délicieux gâteau au chocolat qu’il avait soigneusement coupé avec un petit couteau bleu, le seul qui lui restait...
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Et si Corina avait dit oui à Édouard Christy... cela aurait-il changé quelque chose ? Pour le découvrir, cliquez sur " voir la fin alternative "
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Elle venait de dire oui !
Elle s’appelait Corina, elle avait trente et un ans, c’était une femme bien dans sa vie et qui avait confiance en elle. Elle était mariée à un homme qui s’appelait Baptiste et avec qui elle se disputait souvent. Ensemble ils avaient quatre enfants, des jumeaux Éléonore et Jules qui avaient neuf ans, Carla qui avait douze ans et Antoine qui, lui, avait quatorze ans. Corina souhaitait une vie idéale, celle dont tout le monde rêve car son enfance n’avait pas été des plus joyeuses. Sa mère était morte quand elle avait onze ans et son père avait sombré dans une dépression sévère : il ne souriait plus, n’avait plus goût à rien. Corina avait souvent peur que sa famille sombre aussi et se sentait souvent triste, vide, comme si cette vie n'était pas celle qu'elle voulait.
Alors elle venait de dire oui, oui à Édouard Christy qui était son meilleur ami depuis l’école primaire. Pour Édouard, meilleur ami n’était pas suffisant, il venait de lui proposer une vie à ses côtés. Et Corina avait été séduite, débordée par son désir de vivre une autre vie ; partir avec cet homme qui avait l'air plus ambitieux que Baptiste, son mari, la faisait rêver de nouveau.
Elle sortit du bâtiment, la mine enjouée, la tête levée, fière de ce qu'elle venait de faire ; elle se sentait vivante. Non seulement elle venait de changer sa vie mais en plus elle l’avait fait d’une façon qu’elle adorait : « dire oui en secret ».
Le lendemain, après cet événement, elle décida d'informer sa famille de sa décision. Elle attendit que son mari soit rentré pour réunir tout le monde autour de la table du salon sur laquelle se trouvait un gâteau qu'elle avait soigneusement préparé et découpé avec un petit couteau bleu que son compagnon lui avait offert. Puis une fois tout le monde installé, elle commença ses explications :
« Écoutez, il faut que je vous parle sérieusement de la situation dans laquelle on se trouve. »
Elle regarda son mari dans les yeux et lui fit un sourire moqueur du coin de la lèvre, puis elle poursuivit ses explications :
« La vie dans laquelle je me trouve actuellement n'est pas celle que j’espérais... »
Les enfants se regardèrent inquiets mais cela n'avait pas d'importance pour Corina, qui continua :
« Et c'est pour cela que je vais changer de vie : à partir de demain vous n'habiterez plus qu'avec votre père, les enfants. Mais vous verrez, cela vous soulagera : plus de disputes entre vos parents et peut-être même que votre père trouvera quelqu'un qui lui correspond mieux ; enfin bref tout ça pour vous dire que je partirai demain dès l'aube. »
Ces paroles amenèrent un silence profond autour de la table et l'on pouvait lire les visages tristes et inquiets des enfants et de son mari. Alors, encore une fois, elle brisa ce silence pour demander aux enfants de quitter la table afin qu'elle se retrouve seule avec Baptiste qui avait l'air angoissé :
« Écoute je n'ai rien de plus à te dire, je pars et j'ai mes raisons », expliqua Corina sur un ton agressif et froid.
Puis, elle quitta la table, ne voulant rien entendre et ne donna aucune information supplémentaire sur ce qu'elle allait devenir, où elle irait, et elle ne parla pas non plus de la proposition d’Édouard.
Le lendemain ses cartons étaient bouclés et c’était l'heure de partir pour la jeune femme. Alors elle chargea la voiture et une fois toutes ses affaires dans le véhicule, elle put partir. Elle monta en voiture en ne disant au revoir à personne, alors qu'ils étaient tous sur le pas de la porte à attendre ; et elle fit simplement un signe de la main par la fenêtre en s’éloignant de la maison.
Une fois qu'elle eut fait le trajet et qu'elle fut arrivée chez Édouard, ils déchargèrent tous deux les cartons de la voiture pour les rentrer dans la maison. C'était une grande maison dans laquelle Corina et son mari venaient souvent pour rendre visite à Édouard.
Les jours passèrent et Corina appréciait sa nouvelle vie auprès d’Édouard qui faisait son maximum pour qu'elle soit heureuse : il l'emmenait dîner au restaurant, lui cuisinait des petits plats, lui achetait des habits et l’emmenait faire des sorties en ville. Et justement ce samedi, ils sortirent se promener : ils allèrent dans plusieurs magasins et déjeunèrent dans une crêperie. Lors de cette sortie, les deux amants n'avaient pas remarqué que Baptiste les avait vus ensemble alors ils avaient continué paisiblement leur promenade sans se poser de questions.
Deux jours plus tard, c'est-à-dire le lundi, une journée de travail était passée pour chacun d'entre eux. Dans la soirée, Corina rentra dans sa nouvelle maison après avoir fini cette journée de travail plus tard que les autres jours. Mais Édouard n'était pas là, ce qui n'était pas son habitude, il rentrait normalement avant elle. Alors elle commença à se poser des questions et décida de l'appeler. Le téléphone sonna mais personne ne décrocha alors elle s'écroula dans le canapé, défaite : soit elle avait été trahie, soit il lui était arrivé quelque chose...
Dans la soirée il n’était toujours pas là et Corina commença à paniquer. Elle décida de se rendre au commissariat. Arrivée là-bas, elle prit place sur une chaise parmi tant d'autres, au milieu de cette salle d'attente. Quatre personnes étaient présentes : une dame plutôt âgée en compagnie de son chien avait une mine apeurée, un monsieur maigre fixait ses pieds et avait un visage sans expression tandis qu'une jeune fille accompagnée de sa mère lisait un magazine d’été. Un grand policier aux cheveux châtain rentra dans la salle, vêtu d'une combinaison noire et de hautes bottes gris foncé. Puis il dit d'une voix grave « au suivant » ; c'était au tour de Corina, qui se leva et marcha derrière ce policier pour ensuite arriver dans un cabinet ou deux autres hommes étaient assis et attendaient sans bruit.
« Bonjour madame, » dirent-ils en chœur.
— Quelle est la raison de votre venue ? dit le grand monsieur qui était venu la chercher.
— Eh bien mon mari n'est pas rentré de la soirée, habituellement il rentre avant moi du travail. Quand je suis arrivée il n'était pas là ; au début je ne me posais pas trop de questions, je pensais qu'il avait simplement pris du retard, mais il est maintenant 23h45 et je n'ai eu aucune nouvelle de sa part, il est injoignable. »
Corina avait l'impression que le policier ne l'écoutait pas car il avait la tête tournée vers l'ordinateur et lui répondait par des « hum, hum », quand il leva enfin les yeux de l'écran pour lui dire :
« Vous avez de la chance que la commissariat ne soit pas débordé sinon nous n'aurions pas pris en charge votre problème ; il peut simplement être parti, mais nous allons lancer des recherches le concernant et nous vous recontacterons dès que nous aurons des nouvelles. »
Corina se leva de la chaise et fit un signe de remerciement. Elle se dirigea ensuite vers la porte, suivie du grand policier aux cheveux châtains, qui retournait en salle d'attente prononcer machinalement « au suivant ».
Une fois arrivée chez elle, Corina s’allongea dans le canapé et alluma la télévision pour se changer les idées.
Le jeudi matin avant de partir au travail, le téléphone fixe sonna, et Corina s'empressa de répondre. Un monsieur dont la voix lui était inconnue commença le dialogue :
« Bonjour madame, je cherche à joindre madame Virus Corina.
— C'est bien moi.
— C'est à propos de la disparition d'un certain Édouard Christy.
— Oui , répondit Corina empressée d'avoir des nouvelles et de savoir ce qu'avait à lui dire ce commissaire.
— Je suis désolé de vous annoncer que votre compagnon a été retrouvé mort sur son lieu de travail.
— Mort ? répéta Corina qui pensait et espérait avoir mal entendu.
— Oui madame, mort et plus précisément assassiné, mais le suspect reste introuvable pour le moment, il n'a laissé aucune trace. Nous continuons d'effectuer des recherches.
— C'est tout ? répondit Corina, dont les yeux s'étaient remplis de larmes,
— Heu... eh bien oui, enfin nous avons juste trouvé sur la scène du crime un couteau sur lequel il y avait inscrit « mauvaise décision ».
Nina Chiron