Classe Écritures : Johary Ravaloson

Le dieu du plastique

Il monta sur son vélo. Son père venait de l’appeler pour une affaire urgente. Le Pegasus décolla jusqu’aux nuages, et il alluma le GPS. Il se dirigea vers les États-Unis et fit appel à la foudre pour recharger la batterie du vélo. Il se mit ensuite à pédaler moins vite grâce à l’assistance électrique. Lorsque l’Empire State Building fut en vue, il remonta à une plus haute altitude, et atterrit.

Bienvenue sur le Mont Olympe ! Tatalatata !
— Ah ! Ce jingle ! Combien de fois l’ai-je entendu ! Bizarrement, je crois qu’il y en a un similaire en France ! Était-ce la SNC...F? Bon, peu importe, pensa-t-il. Se concentrer sur l’entretien. Alors que vais-je dire ?
Il se dirigea vers le bureau de son père. La porte était en bois d’ébène et l’encadrement en marbre brut. L’Olympe avait beaucoup changé depuis la première fois où il était venu. Zeus avait installé des palmiers, des bananiers et tout un jardin exotique. La salle des Dieux était maintenant équipée d’une télé géante, d’un baby-foot et d’une table de Ping-pong. Il frappa trois fois à la porte : Toc ! Toc ! Toc !
— Entrez ! lança Zeus.
Il entra dans le bureau. Il s’assit sur un fauteuil de velours rouge et leva la tête. Devant lui se tenait Zeus avec l’apparence qu’il prenait lorsqu’il était son père : 1.80 mètres, musclé, les cheveux châtains, les yeux bleu électrique et aucune ride. La conversation débuta ainsi :
— Je t’ai convoqué ici, mon cher fils, pour que tu reçoives le titre de CSPN (Chef de la Société de Protection de la Nature).
— Non ! Ce… Ce… Ce n’est pas une blague ? bégaya-t-il.
— Eh non ! C’est bien ta responsabilité !
Lorsqu’il sortit de l’entretien, Nimho sautait de joie. Il avait 21 ans mais était né il y a 3000 ans, ayant été plongé dans un long sommeil par Zeus, son père qui voulait le protéger d’un grand danger. Il avait les cheveux bruns, les yeux marron, et il était musclé, surtout des mollets à force de faire du vélo. Il portait un tee-shirt au motif floral et un jean LEVI’S. Ses baskets avaient des semelles spéciales confectionnées par Hermès son demi-frère… Avant de partir, son père lui avait laissé un papier indiquant une adresse dans le Vermont. Il lui avait expliqué que les personnes avec qui il travaillerait ignoraient l’existence des dieux Grecs-Romains et leur lot de bâtards et de monstres. Il lui avait aussi fortement recommandé de ne pas révéler leur existence. Avant de rentrer chez lui, Nimho salua son oncle Poséidon qui regardait le journal télévisé avec rage. Lorsque ce dernier apprit que le 7ème continent grossissait de jour en jour et que les humains continuaient de polluer autant la mer, il explosa de colère et sortit en trombe.

Quatre jours plus tôt. Nimho sortait de la fête organisée par sa meilleure amie. Il était un peu ivre et avait mangé trop de petits fours. Sa démarche était bizarre, ses cheveux, en bataille. Il se dirigea vers son vélo. Il marcha lentement et ne regarda pas où il mit les pieds, il tomba et manqua de se faire écraser par une Polestar jaune et noire pourchassée par la police.
— Saleté de voiture ! Je suis mieux sur mon vélo, au moins je ne risque pas d’écraser quelqu’un !
Il repensa à ce jour où il sortait de l’université. À l’accident. Lui et Ischia rentraient à l’appartement qu’ils partageaient. Ils traversaient la rue, le feu piéton était vert mais la voiture lancée. Lui avait reculé pour éviter la voiture mais elle ne l’avait pas vue. Lorsqu’il l’avait rejointe dans le fossé, son corps était sans vie.
Il sentit les larmes couler à nouveau sur ses joues et se dit que la voiture était vraiment un problème. Il accéléra vers son vélo. Il enfourcha la bête pour rentrer chez lui. Il venait de dire non à la fille qui le draguait. Il savait pourquoi : elle lui avait dit que le vélo, c’était pour les nuls, et qu’elle venait d’acheter une voiture qui fait du 30 litres au cent. Il n’avait jamais vraiment retrouvé l’amour depuis l’accident. Aussitôt arrivé chez lui, il reçut un appel de l’Olympe.
— J’ai besoin de toi avant la fin de la semaine, tu as enfin prouvé que tu étais digne de ce poste, annonça-t-il.
— Que…bredouilla Nimho mais son père avait déjà raccroché.

Deux jours après l’entretien. Nimho était déjà arrivé dans le Vermont. Il atterrit dans un petit jardin, celui de l’homme dont l’adresse était indiquée sur le papier. Ce fut un vieux bonhomme qui l’accueillit, M. Watson, président de l’association avec laquelle Nimho allait travailler. Il invita Nimho à s’asseoir dans un canapé en velours bleu. Sur le mur était affiché un drapeau noir et blanc : un crâne blanc dans lequel un cachalot et un dauphin formaient une espèce de Yin et Yang, soulignés d’un trident pour la mer et d’un bâton de berger pour la protection. Dessous, en grosses lettres, il était écrit : SEA SHEPHERD.
Les deux hommes discutèrent.
— Votre patron m’a appelé pour que je vous embauche, annonça M. Watson.
— Oui, plus précisément pour résoudre le problème du 7ème continent, qui grossit de jour en jour, répondit Nimho.
— Malheureusement le budget de mon association n’est pas assez élevé pour résoudre ce problème, répliqua tristement Watson.
— Ne vous inquiétez pas, j’ai la solution ! J’ai engagé des photographes qui acceptent de revendre leurs photos et ensuite nous verser leur bénéfice. J’ai moi-même une équipe de chasseurs de trésors qui vendront leurs trouvailles pour votre association. Quand nous aurons un budget assez élevé, nous pourrons engager des ingénieurs pouvant faire disparaître ce continent d’une manière ou d’une autre, expliqua Nimho.
— Ce plan me semble parfait ! Au travail ! termina Watson.
Le plan était lancé. Depuis quatre jours exactement. Nimho avait loué un 2 pièces à Malibu pour superviser les opérations. Le budget devrait être de 5 millions de dollars environ, mais pour l’instant, il plafonnait à 50000 $. Nimho décida de participer à la chasse au trésor et de plonger aux abords de la Californie. Il découvrit l’épave d’un vieux navire espagnol au nom bizarre : Gwadenlavia. Il entra dans une espèce de sas et referma la porte derrière lui. Le fait que la porte était restée assez étanche avait préservé l’intérieur d’une cabine. Nimho entra et ouvrit un tiroir dans lequel il y avait environ vingt assiettes, couverts et plats en argent. Nimho mit le service d’argenterie dans son sac à dos et remonta à la surface. Plus loin, il découvrit un hors-bord vide et entreprit de le fouiller. Il découvrit un coffre mystérieux de couleur grise dont les formes laissaient croire qu’il venait d’un autre monde. Il ramena ensuite une valise remplie de billets, sûrement volés, posée sur le pont. En revendant le service en argent et en comptant la somme d’argent découverte, il fit un virement sur le compte de SEA SHEPHERD d’environ 60000$. Le lendemain, Nimho apprit qu’une tempête se préparait et décida de faire une dernière balade en mer, sous le 7ème continent pour prendre des photos.

Le hors-bord nommé « Dague des Mers » fendait l’eau. Nimho était aux commandes. Devant lui s’étendait une immensité de bleu reflétant les rayons du soleil. Le paysage était magnifique, et Nimho souriait. Soudain, une masse sombre apparut à l’horizon : le 7ème continent. Il s’approcha de cette terre plastique plus profonde qu’on ne pourrait le croire, dont l’unique créateur était l’être humain irresponsable. Nimho vérifia l’état de ses bouteilles d’oxygène et plongea. Ce qu’il vit sous l’eau était encore plus chaotique qu’à la surface : des tortues, dauphins et autres animaux marins venaient se coincer dans une prison de plastique, les condamnant à perpétuité. Nimho prit son couteau et libéra plusieurs animaux des dents de ce monstre. Il prit en photo ceux qu’il ne pouvait libérer. Il descendit plus bas. Ce qu’il vit, seul un dieu ou demi-dieu peut le voir. De chaque sac ou emballage plastique sortait une fumée bleuâtre descendant vers le fond pour former une forme connue de Nimho : un corps sombre, et des muscles en béton. À lui seul, il pouvait fendre une montagne en deux, il avait des pieds grands comme un camion (452 de pointure) : Cronos était en train de se recréer, grâce à la pollution plastique. Il lui manquait encore les bras et la tête. Nimho, affolé, remonta à la surface, mit les gaz et rentra à Malibu.

Lorsqu’il arriva chez lui, Nimho mit en ligne les photos. Dans sa tête, ses pensées formaient un tourbillon incompréhensible. Soudain, il se rappela le coffre. Celui-ci était posé sur sa table de chevet, Nimho n’y ayant pas pensé depuis sa découverte. Il décida de l’ouvrir, mais pensa que ce ne serait peut-être pas si facile. Il observa le dessus et découvrit un tout petit trou. Il y glissa une aiguille de couture qui traînait dans ses placards. Il entendit un déclic et le coffre s’ouvrit. À l’intérieur était posé un gant métallique sur lequel quatre pierres étaient emboîtées. Un compartiment vide laissait penser qu’il manquait une pierre. Nimho souleva le gant et un petit carnet en tomba. Nimho ouvrit le carnet mais malheureusement, seule une page avec des dessins de pierres était lisible. Il lut : Étude des PIERRES D’INFINITÉ, PAR ------ les cinq lettres (du prénom du propriétaire de ce gant, sûrement) étaient effacées. Au dos, il était écrit : Pierre de l’espace, de la réalité, de l’esprit, du pouvoir, du temps et de l’âme. Sur chaque dessin de pierre, il y avait un nom et une couleur. Malheureusement, il en manquait une : la pierre jaune du pouvoir. En bas de la page, il était marqué : Claquer des doigts permet de faire disparaître la chose que vous voulez, par exemple les habitants d’une galaxie. Attention, seulement les personnes assez puissantes peuvent le faire sans risque ! Nimho bondit de sa chaise ! Il l’avait la solution pour faire disparaître le 7ème continent ! Et il avait un ami cyclope, Enzo, assez puissant pour claquer des doigts avec le gant de l’Effacé - c’est ainsi que Nimho avait décidé de l’appeler, son nom étant illisible. Il regarda la météo. La tempête annoncée avait bien lieu sur le 7ème continent qui se dirigeait vers la Californie ! Ils devraient faire vite avant la collision des deux continents. Nimho appela son ami mais celui-ci ne répondant pas, Nimho lui laissa un message.
— Salut Enzo, c’est Nimho. Je t’appelle pour te dire de venir dans mon appartement de Malibu. Si je ne suis pas chez moi, prends le coffre posé sur mon lit et rejoins-moi sur la plage. À plus !

Nimho décida d’observer la progression de la tempête créée par son oncle. Arrivé sur la plage de Malibu, il prit ses jumelles et se mit à scruter l’horizon. Soudain, il entendit des appels à l’aide. Il chercha d’où venaient les cris. Il aperçut une petite fille au large sur une bouée en train de se dégonfler ! Nimho courut vers l’eau et nagea jusqu’à la petite fille de toutes ses forces, comme l’un de ses nageurs préférés, Macach. Il la ramena sur le rivage.
— Comment t’appelles-tu ?
— Adèle White, et pour te remercier, je te donne cette pierre que j’ai trouvée sur la plage, murmura-t-elle, elle est précieuse.
Sur ce, la petite Adèle partit en courant rejoindre ses parents. Nimho était encore sous le choc d’avoir sauvé quelqu’un. Il ouvrit la main dans laquelle il y avait une pierre jaune.

La pierre du pouvoir ! Adèle venait de lui donner la pierre du pouvoir ! Il entendit son téléphone sonner, c’était Enzo qui lui donnait rendez-vous au milieu de la plage, près d’un rocher. Lorsqu’ils se retrouvèrent, la tempête était visible au loin. Ils insérèrent la pierre sur le gant et Nimho demanda à Enzo de l’enfiler et de claquer des doigts en pensant au plastique. Le pouce et le majeur du cyclope se rapprochèrent, pendant que la force du gant irradiait dans son bras. Dans un effort surhumain, il claqua des doigts, puis s’évanouit. Sur le carnet de l’Effacé, il était marqué qu’une fois utilisées, les pierres disparaîtraient, mais elles étaient encore là.

Le plastique disparut progressivement. Cela commença par la gauche, les sacs se transformaient en poussière comme une vague déferlant sur ce monstre. Lorsqu’il eut totalement disparu, Nimho s’apprêtait à crier de joie quand une masse sombre sortit des eaux : Cronos ! Nimho l’avait complètement oublié ! Des monstres sortirent de terre et commencèrent à rugir. Des enfants pleuraient pendant que leurs parents se faisaient déchiqueter. Une atmosphère de chaos régnait sur la plage. Cronos s’adressa aux humains, d’une voix titanesque :
— Ceci est le réveil de Cronos, c’est le résultat de votre inconscience. Pour vous remercier d’avoir participé à ma renaissance, je vais vous exterminer jusqu’au dernier !
Flippant, non ? Après quelques millénaires passés dans le Tartare ! Cronos s’approcha du gant que Nimho avait posé sur le sable. Nimho était seul sur la plage rougie par le sang. Le titan s’empara du gant qui lui était familier, appartenant à son cousin. Il l’enfila en ricanant.

Lecteur, le moment est venu de faire un choix, si vous essayez de reprendre le gant des mains de Cronos, poursuivez la lecture. Si vous préférez ne rien faire, cliquez sur "voir la fin alternative"..

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Nimho lui sauta dessus avec son épée, forgée par Héphaïstos, mais Cronos l’expédia à l’autre bout de la plage d’une pichenette. Nimho se releva, malgré la douleur, s’avança et appela Cronos. Celui-ci se retourna et avança vers Nimho en brandissant sa faucille. Nimho avançait, mais Cronos le ralentissait grâce à son pouvoir de contrôler le temps. Pour le déconcentrer, Nimho fit appel à la foudre. Cronos eut une milliseconde d’inattention, juste assez pour que Nimho lui tranche la main gantée et s’enfuie. Il enfila le gant, alors que Cronos se rapprochait de lui. La puissance du gant lui rongea la chair, puis les muscles de toute sa main gantée, puis le bras. Cronos leva la faucille pendant que la puissance du gant commençait à ronger l’œil gauche de Nimho, ses cheveux et son cerveau. Avec la force qui lui restait, il claqua des doigts. Cronos et les monstres disparurent, et les humains morts réapparurent, un peu blessés. Le visage de Nimho pâlit et un filet de sang coula au coin de sa bouche. Enzo s’approcha de lui en hurlant :
— On a gagné, Nimho ! Grâce à toi !
Nimho gémit.
Nimho s’affaissa sur la plage. Au loin, le soleil se couchait dans un mélange de rouge et d’orange et son reflet dansait sur les vagues. Nimho vit les lumières bleues des ambulances approcher. Sa vue se troubla et sa tête cogna contre le sol. Sur le gant, les pierres avaient disparu. Mais ce n’étaient pas les seules.

Paul Menou Houitte